Cépages bannis, trésors retrouvés : l’Europe souhaite redonner une place aux variétés interdites pour garantir l’avenir de la viticulture française
Depuis des décennies, certains cépages français ont été bannis, victimes d’une réglementation stricte. Pourtant, ces variétés anciennes détiennent un potentiel méconnu, en particulier face aux défis climatiques actuels. Aujourd’hui, l’Europe envisage de leur redonner leur place pour assurer un avenir durable à la viticulture française.
Redonner vie aux cépages interdits : une révolution viticole en marche
Isabelle, Clinton, Noah, Jacquez, Othello et Herbemont : ces noms ne sont pas que des reliques du passé. Depuis près d’un siècle, ces cépages hybrides franco-américains étaient interdits en France, accusés à tort de favoriser la diffusion du phylloxéra et de contenir trop de méthanol. Pourtant, une récente étude démontre que leur taux de méthanol reste largement en dessous des normes légales. Ces vieux raisins, boudés par la loi depuis 1934, pourraient bien renaître grâce à un amendement européen adopté à Bruxelles.
Ce texte ouvre la voie à leur réhabilitation, sous réserve de validation par les États membres. S’ils entrent dans le « Paquet Vin » de la PAC 2027, ces cépages pourraient devenir la clé pour une viticulture plus écoresponsable et résiliente.
L’observatoire des cépages anciens : une initiative concrète dans le Gard
Dans le Gard, Christian Vigne, vigneron engagé, mène un combat exemplaire. Il cultive encore l’Isabelle sur quelques hectares et en tire quelques millésimes confidentiels. Sa démarche est claire : par des microvinifications ciblées, il démontre qu’on peut faire de vrais bons vins avec ces cépages anciens. Un vin qui ne demande aucun traitement chimique, une aubaine dans un contexte de transition écologique.
Cette expérience artisanale vise à réhabiliter une image longtemps ternie et à convaincre d’autres vignerons. Le travail de l’Observatoire, créé en 2022, est un précieux repère pour expérimenter et valoriser ces variétés oubliées.
Des trésors viticoles face au défi du changement climatique
Ces cépages anciens ont plus d’un tour dans leur sac. Hybridés entre variétés américaines et françaises, ils sont naturellement résistants aux maladies et supportent mieux la sécheresse. Pour un œnologue, c’est une arme précieuse quand la vigne voit ses conditions de vie se durcir.
Christel Guiraud, président du syndicat IGP Cévennes, souligne l’intérêt gustatif et stratégique. Intégrer jusqu’à 20 % de ces raisins fruités et parfumés dans des assemblages classiques peut créer des cuvées originales. Ce mélange pourrait redéfinir l’identité viticole d’une région tout en réduisant la dépendance aux traitements chimiques.
L’industrie viticole face à ses vieilles peurs
Le rejet de ces cépages interdits a longtemps surgi de peurs dépassées, notamment la crainte du phylloxéra et des risques sanitaires. Mais en 2025, les données montrent que ces craintes ne tiennent plus. Au contraire, leur rusticité et faible besoin en intrants en font des alliés précieux pour une agriculture durable.
Le combat n’est pas que technique, il est aussi culturel. Ces raisins incarnent un pan du patrimoine régional que la standardisation a presque effacé. Leur renaissance est donc un acte de sauvegarde identitaire, qui va bien au-delà des enjeux économiques.
Un avenir redessiné pour la viticulture française ?
Dans les Cévennes, l’idée d’associer vieux cépages et classiques comme Merlot ou Grenache est plus qu’un simple bricolage. C’est la promesse d’une identité viticole renouvelée, ancrée dans la diversité et la durabilité. Christian Vigne et Christel Guiraud illustrent ce tournant, témoignant d’un véritable renouveau.
Le vote européen est un premier pas, mais la route reste longue. Chaque pays devra approuver ces nouvelles normes. Si cette bataille est gagnée, la France pourrait bientôt renouer avec des vins plus naturels, porteurs d’histoire et prêts à affronter les défis de demain.
Source: france3-regions.franceinfo.fr
Julie Glawie est une œnologue basée à Toulouse avec un principe simple : « Un bon vin, c’est comme une personne franche : pas besoin d’en faire trop pour être remarquable. » Formée à la dégustation de haut niveau, Julie décortique chaque vin avec justesse, naturel et précision, sans jamais tomber dans le jargon. Elle adore dénicher des vins vivants et sincères et vous partage des conseils simples, vrais et percutants pour réussir vos accords mets-vins.

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